Vin, pansements, poivrons comment j'ai survécu à mon allergie à la con

Aspirine, crustacés, pansements... six personnes nous racontent leurs allergies, de la plus dangereuse à la plus cocasse.

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On a tous et toutes ce pote pour qui le printemps est un enfer, mouchoir scotché au nez et larme à l'œil. Si elles peuvent être pénibles, voire carrément dangereuses, les allergies sont loin d'être une partie de plaisir. Hypocondrie, socialisation, changement d'habitudes... elles impactent le quotidien de ceux qui les supportent de manière parfois insoupçonnée.

Frédéric, 46 ans, Lille : allergique au raisin

"Un jour je buvais du vin, le même que d’habitude depuis des années, en terrasse avec des amis. D'un coup, je me suis senti pas très bien et je sentais ma peau comme bouger sous mon pantalon. Je suis allé ensuite manger chez une amie et elle a eu un regard effrayé quand elle m'a ouvert la porte. J'ai pris peur quand je me suis vu, j’avais le visage boursouflé. J'ai regardé sous mon pantalon, j'avais comme des piqûres géantes.

Ça s'est renouvelé quelques jours après, toujours en buvant du vin, et de manière plus violente. J'ai dû être accompagné à la pharmacie parce que mes yeux étaient tellement gonflés que je ne pouvais plus les ouvrir. C'était un peu flippant. Au départ je ne savais pas de quoi ça venait et puis j'ai fini par soupçonner le vin.

J'ai fait sept ou huit crises en huit ans. Au départ, ça gratte les paumes de main, le palais, on sent le corps se friper, comme un corps de vieillard. J'ai toujours eu la sensation que j'allais mourir étouffé si je ne prenais pas quelque chose. Et puis un jour, je me suis dit que ça faisait longtemps que je n'avais pas eu de crise, alors que j'avais la certitude d'être tombé sur une vinaigrette louche [Frédéric était allergique au raison, quel que soit la façon dont il était préparé, donc aussi le vinaigre, les raisins secs, etc. NDLR]. Avec mon ami qui est médecin on s'est dit que c'était peut-être parti comme c'était venu. Du coup on a voulu tester avec un bon Bourgogne. Je buvais mon verre et mon ami se préparait à une réaction à chaque instant. Finalement, il ne s'est rien passé et depuis, je n'ai plus rien."

Peut-on devenir allergique du jour au lendemain ?

Selon Habib Chabane, allergologue, il est tout à fait possible de devenir, un beau jour, allergique à un aliment que l'on avait l'habitude de consommer. Il s'agit d'une rupture de tolérance. "C'est une allergie croisée. Quand on est sensible à un allergène respiratoire, on peut devenir allergique à autre chose qui contient la même protéine. Si on est allergique au pollen de bouleau par exemple, ça peut provoquer une rupture de tolérance vis-à-vis de certains allergènes alimentaires", explique l'allergologue. Selon lui, une allergie peut également partir aussi vite qu'elle est venue si l'on change complètement de cadre de vie.

Auberi, 22 ans, Dijon : allergique aux arachides et aux fruits à coque

"Je suis allergique aux arachides depuis que je suis petit. C'est pénible parce que je ne peux pas manger ce que je veux. Je dois lire la notice des produits industriels, vérifier les produits dans les pâtisseries, les snacks… Dans les cafés Starbucks par exemple je ne sais pas ce qu'il y a dedans. Ça arrive qu'il y ait des pancartes dans les vitrines mais en pratique, c'est un peu plus compliqué. Tu ne sais pas si les gens se sont lavé les mains, si les choses se touchent. Ce n’est pas toujours rassurant. Je ne prends pas le risque même avec les produits où il y a marqué "traces éventuelles de fruits à coque". Certains ne vont pas s'embêter, moi je trouve ça un peu imprudent. Ça devient presque une charge mentale, bien que ce soit naturel de le faire.

C'est aussi assez compliqué de pouvoir manger au resto. Il me semble que c'est obligatoire qu'ils aient une carte des allergènes, mais cela dit ce n’est pas toujours le cas. C'est chiant mais tu es habitué. Au collège et au lycée, c'était compliqué pour sociabiliser, parce que je ne pouvais pas manger avec tout le monde. Je devais prendre mon repas, j'avais ma table attribuée. Même aujourd'hui quand tu rencontres quelqu’un, tu ne peux pas vraiment manger dehors."

Quels sont les facteurs pour devenir allergique ?

Vin, pansements, poivrons comment j'ai survécu à mon allergie à la con

L'hérédité augmente le risque de développer des allergies d'après l'allergologue Habib Chabane. "Un enfant dont l'un des parents a une allergie aura 50 % de chance de l'être à son tour. Si ses deux parents le sont, alors il aura 75 % de chance de développer des allergies", commente-t-il.

Mais certains enfants vont être allergiques sans que les parents le soient. Pour le docteur Chabane, cela est dû aux conditions alimentaires et de vie depuis la petite enfance. "La structure de notre société a changé, on habite plus en ville, dans des appartements, tout est plus propre. Les naissances se déroulent dans des conditions d'hygiène plus grandes, la nourriture des nourrissons est stérilisée. C'est la théorie de l'hygiène. Il y a moins de bons microbes qui nous entourent et au contraire, plus de polluants visibles et invisibles. Tout ça favorise le développement d'une allergie". La dernière condition pour devenir allergique est l'exposition à l'allergène de manière abondante.

Tu Ha An, 28 ans, Dijon : allergique aux pansements

"J'habitais encore au Vietnam à l'époque et tout le monde se déplace à vélo ou en scooter. Ce jour-là, j'étais donc à vélo avec une amie et on est passé près d'un scooter avec une tige de fer qui dépassait. Ca m'a fait un trou dans le genou, je devais avoir 13 ans. Notre premier réflexe a été de mettre un pansement sur la blessure.

Ça me grattait beaucoup, donc j'ai pensé à une infection. On est allé voir le médecin qui nous a dit que ce n'était pas grave, mais personne ne pensait à une allergie. Et puis, j'ai commencé à avoir les doigts qui grattent. J'avais le genou gonflé, pas à cause de la blessure mais à cause de l'irritation. Avec mes parents, on a finalement pensé à ça.

Après cet incident, plusieurs années se sont passées sans que j'aie une blessure. Vers mes 15-16 ans, je me suis fait mal au petit doigt et j'avais complètement oublié cet épisode. Du coup, mon doigt a gonflé de nouveau à cause d'un pansement. Maintenant je fais attention à ne pas en manipuler. Le souci, c'est quand je suis inconsciente ! Un jour je me suis fait opérer au Canada, les médecins avaient oublié que j'étais allergique. Le pansement m'avait provoqué un gonflement qui est resté pendant deux mois."

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Fabien, 38 ans, Paris : allergique à l'aspirine

"Je suis atteint du syndrome Fernand Vidal. Cela cumule une allergie à l'aspirine, avec une tendance à l'asthme et une polypose naso-sinusienne, une inflammation des sinus.

Je m'en suis rendu compte en 2005 ou en 2006, quand j'étais étudiant. Un midi, je suis allé déjeuner chez une copine et j'avais mal à la tête. Elle m'a donné un Aspégic et une heure plus tard, quand je suis revenu en cours, j'avais vraiment l'impression d'étouffer, de ne plus pouvoir respirer que par le tout petit trou d'une aiguille. Les gens ont vu tout de suite que je n’allais pas bien. Je suis allé à l'infirmerie qui a appelé SOS Médecins. Et on m'a dit que c'était une sorte de choc allergique et qu'il ne fallait surtout pas que je consomme d'aspirine à l'avenir.

Quand j'ai grandi je prenais toujours du paracétamol, des Efferalgans, du Doliprane… Je ne faisais même pas la différence entre ça et l'aspirine. Pour moi, c'était du cachet effervescent donc je mélangeais un petit peu tout.

Tout le monde autour de moi est au courant et je fais très attention chez moi à n'avoir que du doliprane. Mais j'ai toujours cette peur quand on demande un peu à la cantonade à un collègue "tiens est-ce que t'as un doliprane pour moi". Je me fais des coups de flip une fois que j'ai ingéré le truc parce que je n'ai pas vérifié l'emballage par exemple.

Quand je prends un médicament que je ne connais pas, même si c'est un médecin qui me le prescrit et que je lui signale, je suis toujours à le répéter. Ça a créé des réflexes hypocondriaques d'une certaine manière, ou plutôt une peur de prendre des médicaments."

Romane, 25 ans, Paris : allergique aux crustacés, aux arachides, aux acariens, au pollen…

"Quelques semaines après ma naissance, quand j'ai bu du lait de vache, ils ont vu apparaître des plaques sur mon visage. En passant au lait de soja, c'est passé tout de suite. Ensuite à 8 mois ils ont compris que j'étais allergique aux jaunes d'œufs. C'est contraignant parce qu'il y en partout, dans les préparations de gâteaux, les pâtes, la mayonnaise… À 2 ans, j'ai mangé une cacahuète pendant que mes parents faisaient un apéritif et j'ai fait un œdème de Quincke. En fait, je ne sais pas ce que c'est que de ne pas être allergique à quelque chose. Je me suis acculturée à devoir toujours faire attention à ce que je mange. Mon allergie au lait s'est arrêtée à l'âge de 2 ans et j'ai pu manger du jaune d'œuf à partir de six ans.

Mais ça ne s'est pas arrêté là ! À l'âge de 15 ans, j'ai fait une très grosse réaction allergique à une langoustine sur un port de pêche au Maroc. Au début, ça provoque des picotements sur les lèvres ou le palais, parfois le nez mais aussi des soucis respiratoires, de l'eczéma sur tout le corps, même sous les pieds.

Mon allergie aux crustacés est la plus dure à vivre parce que j'avais l'habitude d'en manger, j'adorais ça et je ne sais pas quand je pourrais en manger de nouveau. Je suis aussi allergique aux chats, aux acariens, au pollen de pas mal d'arbres… Je le vis plutôt bien parce que j'ai grandi avec ça, c'est une question d'habitude. Bien que la plupart du temps, je garde une trousse de secours sur moi en cas de réaction."

Peut-on se faire désensibiliser à tout âge ?

Il est possible de se faire désensibiliser auprès d'un allergologue dès l'âge de cinq ans. "Plus on commence tôt, mieux c'est. Après 14 ans ça devient compliqué", détaille Habib Chabane. Le processus consiste à faire ingérer des doses de l'allergène mélangé avec d'autres aliments de manière croissante. "On va donner une quantité tolérée pour induire une tolérance à l'aliment, explique l'allergologue. Toutes les deux semaines on va augmenter cette tolérance, et au bout d'un an, il est possible de pouvoir faire ingérer un verre de lait à quelqu'un qui y était allergique". La désensibilisation est possible pour des allergies graves, permettant par la suite aux patients de pouvoir en ingérer sans risquer leur vie.

Pour les adultes, il est également possible de démarrer cette démarche, bien que cela soit "plus difficilement réversible" dans leur cas, selon le Docteur Chabane. "Il y a peu de demande chez les adultes, donc il faut trouver un centre qui peut le faire".

Jean, 38 ans, Paris : allergique à l'intérieur du poivron

"Je suis cuisinier donc je me suis rendu compte de ça en cuisinant, il y a 15 ans. La peau du poivron est quelque chose qu'on ne digère pas, donc je les pèle. En touchant l'intérieur, ça me crée une réaction, comme si j'avais passé la main dans des orties, avec des petites vésicules sous la peau. Ça peut faire gonfler parfois et beaucoup démanger. Étonnamment je ne suis pas allergique aux autres légumes de la même famille comme les tomates ou les aubergines. Et puis surtout, je n'ai aucune réaction en mangeant du poivron, seulement en le touchant.

Il me suffit de mettre des gants et le problème s'arrête là ! Comme ce n'est que cutané, je n'ai pas besoin de prendre un antihistaminique."

Il est toujours vivement conseillé de consulter un(e) allergologue pour s'assurer de son allergie, qui n'est pas à confondre avec une intolérance.

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