Politique Au Nicaragua, le rouge à lèvres comme arme de protestation politique

Le maquillage peut-il être une arme politique ? Oui, si l’on en croit la situation au Nicaragua. Depuis le mois d’avril, le pays est secoué par une violente crise politique, qui oppose le président, Daniel Ortega, 72 ans, aux manifestants qui l’accusent de vouloir mettre en place une dictature en compagnie de sa femme, Rosario Murillo. Depuis le début de cette crise, près de 500 personnes auraient été arrêtées et 300 auraient perdu la vie dans des affrontements avec les forces du régime, selon les chiffres du Centre nicaraguayen des droits de l’Homme (Cenidh), relayés par France 24.

Pour le mouvement #SoyPicoRojo – qu’on pourrait traduire par « je suis un bec rouge » – tout a commencé le 14 octobre, sur un parking de centre commercial à Managua, la capitale du Nicaragua. Une centaine de manifestants s’y donnent rendez-vous et protestent contre la politique de Daniel Ortega. Les forces de l’ordre interviennent et 38 personnes sont arrêtées. Parmi elles, la journaliste, sociologue et militante féministe Marlen Chow. Ancienne activiste contre la dictature d’Anastasio Somoza dans les années 1970, elle décide de se maquiller juste avant son interrogatoire par la police et fait le choix de porter un rouge à lèvres rouge vif. Elle le fait ensuite passer à ses codétenues, et les invite à faire de même. Toutes l’ont imité, sans craindre de représailles puisque porter du rouge sur ses lèvres n’est pas un crime. « Qu’est-ce qu’ils pouvaient bien nous faire pour ça ? » a d’ailleurs réagi Marlen Chow, libérée le jour même avec sept autres femmes.

Le rouge à lèvres est devenu un véritable symbole de résistance contre la politique d’Ortega

Lors de son interrogatoire, les policiers ont questionné Marlen Chow sur son appartenance à une organisation. Ce à quoi elle a répondu, ironiquement, qu’elle faisait « partie de l’association des becs rouges ». La militante a ensuite raconté aux médias que cette réponse avait « déstabilisé » les enquêteurs. L’histoire a vite fait le tour des réseaux sociaux, où le hashtag #SoyPicoRojo a émergé. Femmes et hommes se sont emparés du mouvement, en postant des photos d’eux, les lèvres teintes en rouge. Le rouge à lèvres est devenu un véritable symbole de résistance contre la politique de Daniel Ortega et de sa femme Rosario Murillo. Les utilisateurs du hashtag demandent la libération des 500 opposants au régime emprisonnés depuis le début du conflit et ils ont été rejoints par des internautes des quatre coins du globe dans leur combat.

« « J’appartiens à l’association des becs rouges », Marlen Chow, 15-10-18. Moi aussi #Jesuisunbecrouge »

Someday I’m gonna meet someone who will show me how to use commas properly and ima love them unconditionally till forever.

— Benicio Incognito Thu Jul 22 18:33:14 +0000 2021

« Les mardis, je suis bénévole avec des amies dans une maison de retraite, et aujourd’hui, j’ai demandé aux grands-mères ce qu’elles pensaient de la situation et des prisonniers politiques, elles ont répondu comme ça : #Jesuisunbecrouge »

« Demain, nouvelle forme de protestation avec l’association des femmes au bec rouge, et demandons la liberté pour tous et pour chacun des prisonniers politiques #SOSNicaragua »

« Nous dénonçons le gouvernement nicaraguéen en portant du rouge à lèvres rouge. Ce sera probablement la prochaine chose rendue illégale au Nicaragua. #Jesuisunbecrouge #LibérezAmayaCoppens #SOSNicaragua »

« Je me joins à la protestation créative des femmes nicaraguéenne qui ont affronté le régime avec beaucoup de valeurs. Force les enfants ! #Jesuisunbecrouge #SOSNicaragua #SOSNicaraguaGlobal »